Dimanche 05 octobre 2025
Le contenu de cette lettre dominicale est tout autant un sujet d’actualité depuis l’aube de l’humanité que de réflexion et de réflexivité.
Ce que nous nommons globalement le bien, le mal et la neutralité font partie de l’histoire de l’humanité depuis ses prémices ainsi que ses jugements et ses conséquences. Un acte ou son absence se définissent dans l’une, sinon deux et parfois dans les trois catégories en même temps. Ainsi, il n’est aucune action sans conséquence et si la prévisibilité immédiate comporte un fort pourcentage de certitude, à mesure de l’éloignement dans le temps, les conséquences mesurables deviennent des facteurs X accompagnés de vecteurs de probabilités de celles-ci et donc des actes pratiquement inévitables s’inscrivant dans ces trois catégories.
Une action « théoriquement » primordiale et son absence déclenchent toujours une réaction qui est, elle-même, un acte les reliant directement signifiant ainsi que l’acte primaire et ses conséquences ne sont toujours qu’une seule action qui se poursuit invariablement comme une onde qui ne rencontre aucun obstacle, sachant que le premier déclenchement ne se situe qu’à un niveau macroscopique tel qu’il est encore en étude en cosmologie par ce qui est dénommé comme étant la naissance de l’univers et qui n’est autre qu’une expiration étant elle-même la conséquence d’une inspiration, précédant son opposée et ainsi de suite jusqu’à l’instant de l’absence de toute matière provoquant un échauffement d’un vide absolu du néant primordial.
Au niveau individuellement humain, nous devons nous-même notre existence à l’interaction d’un matériel génétique et de toutes les actions individuelles de leur porteur, dont eux-mêmes n’en sont que le résultat et dont le fil remonte au premier âge de l’humanité et avant lui jusqu’au plus petit dénominateur commun quelques milliards d’années plus tôt avec la formation de notre pomme de terre stellaire.
Pour en revenir au présent, chacune de nos actions est pensée et réfléchie, parfois sans que nous en ayons conscience et ne doit son apparence de hasard que pour les rares hésitations qui influencent la prévisibilité d’un processus déterminé à l’avance et qui se retrouvent dans l’effet papillon.
Afin toutefois de ne pas discourir interminablement, d’en oublier qu’il s’agit d’une lettre et qu’elle ne doit pas s’éterniser avant le sujet initial, nous dirons, pour simplifier à l’extrême, que nos actes passés étaient prévisibles, que ceux à venir le sont tout autant depuis le prélude de l’éternité elle-même et que le hasard n’est rien de plus qu’une poignée de grains de sable sauvagement disséminés dans cette éternité par un farceur car il est une règle admise que Dieu est un joueur de cartes.
Si nos actes ont des conséquences, il faut que les premiers puissent faire l’objet d’un jugement par nous-mêmes ou par un tiers.
Les juges de la loi des hommes
Ils ne sont pas uniquement des porteurs de toge noire trônant au-dessus du justiciable, mais tout autant d’individus disséminés dans toutes les strates des sociétés humaines. Ils veillent « théoriquement » au respect des lois écrites et aux lois morales en fonction de leurs propres convictions, intérêts, représentations, préjugés, valeurs morales.
Les juges de la loi des hommes pratiquent par nature une justice arbitraire.
L’homme juge ses propres actes, s’absout ou se condamne lui-même
Il est à la fois l’accusé, la victime, le juge, l’avocat, le juré et le bourreau. Tout comme le juge de la loi des hommes, il est sensible à ses convictions, ses intérêts, ses représentations, ses préjugés, ses valeurs morales, mais il n’est tenu à aucune obligation de respecter ses propres lois.
L’homme juge ses propres actes en son âme et conscience et ne rend compte qu’à lui-même.
L’homme juge par la loi des hommes les actes d’autrui, absout ou condamne
Il ne représente pas de puissance non terrestre accompagnée de textes inspirés de croyance multiples, mais uniquement ceux que lui ont transmis les communautés humaines, qui elle-même se sont accordées sur des règles communes.
Son jugement est toujours faillible, perfectible et par conséquence imparfait et donc injuste.
La corruption morale de la justice des hommes et la corruption humaine des juges
Dès lors que les hommes pratiquent une justice arbitraire, avec leur conscience, que leur jugement est faillible, perfectible, imparfait et injuste, ils sont ouverts à la corruption morale et matérielle provenant des personnes qu’ils ont le devoir de juger équitablement pour le bien de la communauté qu’ils représentent tout en se condamnant moralement à leur propre regard et plus gravement au regard de la communauté humaine en pratiquant le mal, tout en s’absolvant.
La corruption morale est intrinsèque à la justice des hommes et provoque irrémédiablement son dévoiement.
Le juge de la loi divine
Il est le Dieu des hommes et ne peut avoir été infaillible en façonnant une créature à son image qui s’est pervertie elle-même en reniant ce joueur de cartes, lui ôtant ainsi le pouvoir d’exercer son jugement divin sur la corruption morale, existentielle et matérielle de ceux sur lesquels, il avait originellement une responsabilité morale avant de leur accorder le libre arbitre.
Dieu est un mauvais joueur de cartes.
Dieu juge par la loi divine, les actes des hommes, absout ou condamne
Il juge sa propre création comme une erreur de jugement commise dès lors qu’il eut l’idée de se représenter en une créature sans attributs divins, mais avec le souvenir de ceux-ci, leur permettant de se prendre pour des joueurs de cartes avec la croyance que leurs jugements sont infaillibles en ce qu’ils sont leur propre juge avec le pouvoir de s’absoudre ou de se condamner eux-mêmes, mais en accordant également à Dieu un pouvoir d’absolution et de condamnation qu’il ne possède plus.
Dieu juge ses propres actes, s’absout ou se condamne lui-même
L’inexistence de Dieu parmi les hommes qui se prennent pour Dieu résulte que ses créatures l’ont jugé et condamné à ne plus paraître parmi eux en ce qu’il s’est montré faillible, imperfectible de par ses propres faiblesses en absolvant les erreurs humaines par sa miséricorde, provoquant ainsi un désordre perpétuel dans les jugements de ces derniers soumis à toutes les formes de corruption.
Le pouvoir d’absolution et de condamnation divin a été offert aux hommes qui ont condamné Dieu tout en l’absolvant de son péché d’orgueil de la création humaine
Le jugement dernier
C’est à la fois le dernier regard sur soi à l’instant de l’ultime souffle de vie, l’instant de la condamnation ou de l’absolution qui est prononcée par la dernière juridiction humaine, l’opprobre publique, le couperet d’une sanction définitive, l’acte public et privé déchirant la bonne entente.
C’est le dernier instant durant lequel les derniers artifices se brisent, où le masque social se craquèle pour laisser apparaître le visage nu et dépouillé de chacun.
C’est le tribunal de la conscience humaine individuelle qui rappelle les gestes oubliés, exhume les paroles étouffées, ressuscite les fautes dissimulées et les vertus trahies.
Il ne reste que le justiciable dans sa révélation divine, pleinement et toujours faillible.
Dénoncer le jugement dernier de la justice humaine, de Dieu et de la conscience est le principe même de la vie qui ne veut pas s’éteindre sans livrer une dernière bataille pour l’honneur d’avoir vécu.
Ceci est une lettre, donc forcément brève et ainsi toujours trop courte au regard d’un sujet que l’on aurait souhaité aborder et développer plus longuement, mais, perçu pour le lecteur, comme une délivrance de la voir si courte, sinon frustrante en ce qu’elle ne répond que partiellement et rarement aux questionnements individuels, d’ailleurs qu’aucun ouvrage ne peut davantage répondre à cette fonction de réponse absolue d’un sujet quelconque.
Bien que je l’aurai souhaité, moi-même, plus argumentative et autrement plus longue, il est depuis quelques semaines une idée vivace que je me dois de tenter de rendre à ces missives ce qu’elles étaient originellement ; des instants de lectures qu’il soit possible à chacun de parcourir du regard en quelques minutes, mais dont la trame cérébrale demeurerait persistante plusieurs heures durant.
Et en ce jour, il est un retard qui s’accumule derrière ma porte en l’impression et la réimpression de ces missives dominicales et de l’acquisition d’un appareil dédié pour me permettre la future dissémination urbaine.
Post-scriptum,
L’image illustrant la version numérique de cette lettre rappelle avec humour que seul les humains aiment s’imaginer être des Dieux.
Nouvelle lettre de ma tante Jeanne
11 janvier 1974
Les petits méchants de la quotidienneté
Mon petit Nicolas,
Ta nature d’enfant sauvage sera tout à la fois ton issue pour te libérer de la société des hommes et ne jamais te laisser emprisonner dans l’esprit d’une humanité à la mortifère destinée et ton fardeau dont certains feront tout pour t’en délester afin de t’empêcher de poursuivre ta route. Veille à ne jamais te laisser guider par les chants, te laisser distraire par les discours, t’abandonner à la facilité des combats de nuages, car tu ne ferais que fragiliser ta particule élémentaire.
La lassitude mène à l’abandon et toujours prend naissance dans l’esprit de ceux qui cultivent le ressentiment et la jalousie. Laisse la germination s’effectuer dans l’esprit des individus qui ne peuvent vivre de leur propre humanité et ne te retourne pas pour en observer les effets. Tu ne ferais qu’observer la laideur de leur inhumanité tout comme lorsque les hommes croisaient le regard de la gorgone.
Ton grand-père les nommait « les petits méchants de la quotidienneté ».
Ils te suivront quelques semaines, quelques mois tout au plus, puis commenceront à se laisser gagner par la lassitude et l’abandon avant de repartir à l’endroit même où ils t’ont un jour croisé. Et ils recommenceront avec d’autres que toi. Et encore, et encore jusqu’à ce qu’ils finissent par s’asseoir sur un canapé devant une télévision en se cultivant avec l’avis des autres et la vie des autres à défaut d’imaginer et de vivre la leur…
Ta tante Jeanne
Une lettre ne devant plus se refermer sans le passage de mes livres lus au cours de la semaine.
Walden ou la vie dans les bois
Henry David THOREAU
Édition Gallimard
Dépôt légal : février 2016
Page 150
Il n’était même pas une alouette des prés, pas un loriot, ces doux oiseaux de la plantation, pour jamais visiter mon défrichement. Pas de coq pour cocoriquer en ce moment ni de poules pour caqueter dans la cour de ferme. Pas de cour de ferme ! mais la libre Nature venant battre à votre seuil même. Une jeune forêt poussant sous vos fenêtres, les sumacs sauvages et les ronces forçant votre cave ; de résolus pitchpins frottant et craquant contres les bardeaux, en quête de place, leurs racines en train de gagner le dessous même de la maison. En guise de seau à charbon ou de volet que le vent a fait tomber, – un pin cassé net ou les racines en l’air derrière votre demeure pour le combustible. En guise de sentier conduisant à la barrière de la cour d’entrée pendant la Grande Neige, – pas de barrière, – pas de cour d’entrée – et pas de sentier vers le monde civilisé !
Une lettre ne devant plus se refermer sans une citation personnelle qui vaut parfois mille mots.
Un selfie miroiresque de salle de bain, d’ascenseur ou de hall d’immeuble avec le regard porté sur l’écran du smartphone et la question pratiquement identiquement similaire à celle d’une célèbre marâtre de Walt Disney, c’est la version moderne de Blanche-Neige.
« Smartphone smartphone, dis-moi, dis-moi que je suis la plus belle ! », tandis qu’invariablement, ce dernier ne répond jamais en raison que les contes de fées avec les princesses avec des rêves merveilleux et des manants avec des poches vides, c’est dans la presse people qu’ils se trouvent.



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